mercredi 29 décembre 2010

La favela du Mont Kassioun

24 Décembre 2010, lorsqu’on se retrouve englouti dans la ville de Damas, on manque un peu de perspective. Difficile, d’apercevoir l’horizon. Pour y voir un peu plus clair, il faut prendre de la hauteur. Demandez à n’importe quel chauffeur de Taxi de vous déposer au Mont Kassioun, et il vous y emmenera volontier pour la modique somme de 150 Livres syriennes, l’équivalent de 3 Dollars. Arrivé en haut, il ne vous reste plus qu’à contempler la fourmilière en pleine ébulition de jour comme de nuit. Si vous portez votre regard à l’Est, la ville toute entière avec ses 1 million et demi d’habitants vous fait face. Si le pays du Cèdre vous manque,  vous n’avez qu’à vous retournez pour deviner l’Anti Liban et ses innombrables monts enneigés. C’est l’endroit idéal pour prendre un café non filtré et vous aérer les poumons encrassés. Je conseille à n’importe quel voyageur de s’y attarder et de cheminer le long de la route sinueuse. La discrétion est de rigeur. Le lieu est particulièrement prisé par les amoureux en quête d’un peu  d’intimité.  
Lorsque vous redescendez à pied, vous remarquerez qu'à la différence du Liban, où chaque parcelle de terre surélevée est colonisée par les grandes familles bourgeoises, le flan de colline est occupé par des populations défavorisées. Si vous vous perdez, ne paniquez pas. Demandez plutôt votre route aux enfants qui connaissent cette ville oblique par coeur. On ne vous demandera rien en retour si ce n'est une photo de groupe, ou un simple sourire... 




lundi 20 décembre 2010

Sabra et Chatila

Octobre 2010, pourquoi visiter un camp de réfugié palestinien lorsque l'on a strictement rien à apporter ? Cette question je me la suis posée et je me la pose encore. Quel est l’intérêt pour un européen de se rendre dans un lieu qui ne figure certainemnet  pas dans le guide du routard. Est-ce la quête de l’adrénaline ? Est-ce pour dire de retour en Suisse « je suis allé à Sabra et Shatila » ? Pour ma part, c’est un mélange de curiosité malsaine et d’esprit de contradiction. Que ça soit, l’université chrétienne où je fais mes études, ou l’ambassade française en passant par le département fédéral des affaires étrangères, il est fortement déconseillé de s’aventurer dans ce genre de contrés « hostiles ». Pour preuve, la plupart des libanais avec lesquels j’ai discuté n’y ont jamais mis les pieds. Il est vrai, que le choc culturel est collossal lorsqu’on passe en l’espace d’un quart d’heure, d’un quartier occidentalisé du centre ville, à la banlieue sud de Beyrouth. L’inégalité est à son comble.
Il y a plusieurs choses frapantes qui sautent aux yeux à quiconque pénètre dans le camp palestienien. Le périmètre n’est pas un endroit clos avec un accès sévèrement controlé. N’importe qui peut y rentrer ou en sortir à son gré. J’ai même été surpris d’apprendre que la population y habitant n’était pas composée uniquement de Palestiniens, mais aussi de familles libanaises aux revenus modestes. L’Etat y est totalement absent : le maintien de l’odre se fait à travers les milices du Fatah et du Hamas qu’on croise de temps à autre, le ramassage des ordures n’est pas assuré.
Bref, les gens vivent dans du provisoire qui dure depuis près de 60 ans dans l’attente d’un hypothétique retour en Palestine et ceci dans l’indifférence totale des classes dirigentes. Tout est fait pour rappeler au réfugé qu’il est justement un réfugié et rien d’autre. C’est la Nakba, la grande catastrophe, qui a précipité des milliers de familles à  venir trouver refuge au Liban. Ils ont tout quitté, persuadé d’un retour imminent au point  de conserver la clé de leur maison.  Alors depuis 49, date de la création du camp de Sabra et Chatila, on cultive ce souvenir pour savoir d’où l’on vient. Les photos gigantesques de la mosquée Al-Aqsa, affichées aux intersections sont là pour ne pas l’oublier, comme cette fameuse "clé du retour" qu’on transmet aux générations qui n'ont jamais foulé la terre promise.

jeudi 16 décembre 2010

Du passé, faisons table rase !

1er Septembre 2010 (23h), sur la route qui relie l’aéroport Rafiq Hariri au centre ville,  je me suis véritablement demandé pourquoi j’avais fait le choix de passer une demie année dans cette ville. Epuisé par le voyage, terrorisé par le plus libanais des chauffeurs de Taxi, nous eûmes à peine le temps de réaliser que nous venions de pénétrer dans une jungle de béton et de lumière.  Cette première impression met du temps à se dissiper. Visiter Beyrouth quand on ne sait où aller,  est synonyme de beaucoup d’heures de marches à travers des quartiers sans véritables  liens entre eux. C’est ainsi que sans le prévoir, nous nous sommes retrouvés, à de nombreuses reprises Patricia et moi au milieu d’un quartier chiite aux attraits conservateurs, bien loin des boutiques de luxes du centre ville. L’appartenance communautaire semble s’enraciner dans des zones géographiques bien délimitées, ce qui donne à la ville un aspect  assez incohérent. Ce constat personnel, s’est vu confirmé par les nombreuses conversations que j’ai pu avoir avec des Libanais ayant vécu l‘expérience de la guerre civile: « si tu avais pu voir le Beyrouth des années 60 (…) la perle du Moyen Orient (…) le communautarisme n’était encore qu’une vague idée etc… ». Ce conflit fratricide qui aura duré près de 15 ans,  fait désormais parti d’une mémoire collective qu’on aimerait bien éradiquer au plus vite. Les immeubles criblés de balles condamnés à la démolition,  ne sont que le pâle reflet d’une époque qu’il faut impérativement oublier. Alors on rase à tout va, sans prendre le temps de savoir ce qu’il serait bon de conserver. Du Beyrouth, d’avant guerre, il ne reste pratiquement plus rien si bien que les autorités se sentent obligées de nous prévenir lorsque nous pénétrons dans une « rue à caractère traditionnel ».

Toutefois, sans que j’arrive à me l’expliquer, plus le moment du départ approche, plus j’ai la certitude que cet étrange capharnaüm va me manquer. C’est sans doutes, dans ses contradictions que Beyrouth trouve sa singularité. 

mardi 14 décembre 2010

L'omniprésence du symbolisme


Septembre 2010, marcher dans les Souks de Damas, c'est comme se retrouver dans un film d'après guerre emprunt d'orientalisme. Chacun de nos sens est mis à contribution, si bien qu'il est difficile de conserver tout sens de l'orientation au milieu d'une foule grouillante et entraînante. La meilleure façon de connaître une ville est de s'y perdre, et c'est ainsi que je me suis retrouvé avec mon amie suisse allemande, devant une situation  imprévisible. Au beau milieu d'une de ces ruelles étroites, nous sommes tombés nez à nez sur une plaque représentant les couleurs israéliennes, l'ennemi juré de la Syrie. La contourner aurait été mal venue, alors même que des enfants venaient d'essuyer leurs chaussures dessus. Cette haine populaire à l'égard de l'Etat hébreux semble tout à fait compréhensible. Le plateau du Golan est occupé et colonisé depuis 1967. Toutefois, symboliquement, fouler l'étoile de David n'a pas la même signification pour un étudiant européen habitué au politiquement correct et au discours modéré, qu'à un Syrien à qui on a inculqué la haine du sionisme. Je ne sais pas dans quel mesure, la mise en scène est révélatrice d'un état d'esprit, toujours est-il qu'il est est difficile de passer son chemin sans regarder ce sur quoi on met les pieds...



lundi 13 décembre 2010

Les enfants de Palmyre



Novembre 2010, visiter des ruines n'a jamais été mon dada. Lorsque j'arrive dans une ville, ce que je cherche avant tout, c'est voir comment les gens vivent, comment ils font leurs courses, comment ils s'habillent. Palmyre est une Oasis perdue au beau milieu du désert syrien. Tout est fait dans cette ville pour qu'on détourne le regard. On vient avant tout pour voir un amoncellement de pierres. La médina qui se vide de ses habitants, ce n'est pas ce que l'archétype du touriste que je suis, souhaite voir.  Cette fascination pour le passé m'intrigue autant qu'elle me révolte. D'ailleurs pourquoi ai-je fait tous ces kilomètres sinon pour voir des colonnes qui tiennent encore debout. Pourtant c'est bien le regard impénétrable de cette petite fille, que je retiendrai de ma visite.