Implantation israélienne à coté de Bethléem |
Février 2011: de tous les slogans que j’ai vu affichés sur le Mur, celui ci traduit le mieux la tragédie palestinienne. Mon but n’est pas ici, de dresser un portrait détaillé de l’occupation israélienne, des enjeux, des protagonistes. Je ne suis pas assez qualifié pour en parler, et de toutes manières, les statistiques peuvent se trouver facilement sur internet. Je voudrais vous parler de l’occupation tel que je l’ai vue, en tant que touriste subjectif. Celle qu’on voit sans nécessairement chercher à la voir. L’occupation vécue par le palestinien moyen. Ce que j’ai vu est tout sauf anecdotique autrement je ne me permettrais pas d’en parler.
L’idée m’est venue d’écrire cette note après mon retour de la ville biblique de Jericho située au cœur de la Cisjordanie. Chaque bus arabe, revenant des territoires palestiniens est systématiquement inspecté, et n’importe quel passager a dans le meilleur des cas, l’obligation de montrer ses pièces d’identités. L’uniforme apparaît, les papiers sont levés, mis en évidence, pour que le maître d’école puisse faire son travail de contrôle. Cette fois ci, c’est une soldate qui s’en charge fraichement arrivée de France en regardant d’un air nonchalant et méprisant ces arabes comme si c’était des cafards. Pendant ces quelques minutes d’un ridicule sans limites, elle n’aura jamais prononcé un seul mot d’arabe. Même dans les dictatures que j’ai traversées pendant mon voyage, je n’ai jamais vu un tel manque de professionnalisme. On pourrait s’attendre à voir une certaine gène de la part de cette étrangère qui perturbe le quotidien de ces gens qui après tout ne font que rentrer chez eux. Au lieu de ça, cette jeune femme, pas plus âgée que moi, remplit sa besogne tout en parlant au téléphone avec son petit ami. Un enfant pleure, un permis tombe, c’en était trop pour elle, incapable d’accorder à son interlocuteur toute l’attention nécessaire. Excédée, elle lâche insulte sur insulte dans une langue que j’étais bien sûr seul à comprendre. Cette scène fait partie de la vie palestinienne. Elle n’est pas particulièrement violente ni exceptionnelle. Elle est juste d’une banalité affligeante illustrant tout le mépris que peuvent avoir certains israéliens pour un peuple sous le joug d’une colonisation galopante.
Le trajet de Ramallah à Nablus vous donne une idée de l’étendue de celle ci. En fait, vous n’avez qu’à tourner la tête vers la première colline pour apercevoir les implantations juives. Ces villages sont les exemples paradigmatiques du principe de « Gated communities ». Des complexes d’habitations entourés de béton, de fils barbelés et de miradors. Ces gens ont renoncé à une vie facile et agréable qu’ils auraient sûrement pu avoir à Tel-Aviv. Au lieu de ça, ils ont décidé de vivre dans des prisons pas forcements toutes spacieuses pour des motifs que j’estime être politico-religieux. Sauf que cette fois ci, le prisonnier est de l’autre coté du mur et c’est le garde qui s’est enfermé à double tour. Ces colons ne se mélangent pas avec la population locale, ne prennent pas les mêmes bus. Ce sont deux mondes juxtaposés qui en sont arrivés à un point où seule la force et la brutalité comptent.
Ce qui se passe en Palestine pose une question fondamentale : celle de l’altérité. Il faut le voir pour le croire. En discutant avec un fermier de Jericho, ce dernier m’a demandé pourquoi j’étais venu lui rendre visite, alors que tout autour, les autres peuples arabes jouissent du droit des peuples à disposer d’eux même. Embarrassé par la question, je lui ai répondu, que je voulais décrire en Europe ce que j’avais vu pendant mon séjour dans l’espoir que cela fasse une différence. D’un air sceptique, il me coupa d’un trait, pour me dire « There is no solution » avec tout le fatalisme qu’on peut imaginer. La conversation s’acheva sur un « inch allah » sans convictions.
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