lundi 20 décembre 2010

Sabra et Chatila

Octobre 2010, pourquoi visiter un camp de réfugié palestinien lorsque l'on a strictement rien à apporter ? Cette question je me la suis posée et je me la pose encore. Quel est l’intérêt pour un européen de se rendre dans un lieu qui ne figure certainemnet  pas dans le guide du routard. Est-ce la quête de l’adrénaline ? Est-ce pour dire de retour en Suisse « je suis allé à Sabra et Shatila » ? Pour ma part, c’est un mélange de curiosité malsaine et d’esprit de contradiction. Que ça soit, l’université chrétienne où je fais mes études, ou l’ambassade française en passant par le département fédéral des affaires étrangères, il est fortement déconseillé de s’aventurer dans ce genre de contrés « hostiles ». Pour preuve, la plupart des libanais avec lesquels j’ai discuté n’y ont jamais mis les pieds. Il est vrai, que le choc culturel est collossal lorsqu’on passe en l’espace d’un quart d’heure, d’un quartier occidentalisé du centre ville, à la banlieue sud de Beyrouth. L’inégalité est à son comble.
Il y a plusieurs choses frapantes qui sautent aux yeux à quiconque pénètre dans le camp palestienien. Le périmètre n’est pas un endroit clos avec un accès sévèrement controlé. N’importe qui peut y rentrer ou en sortir à son gré. J’ai même été surpris d’apprendre que la population y habitant n’était pas composée uniquement de Palestiniens, mais aussi de familles libanaises aux revenus modestes. L’Etat y est totalement absent : le maintien de l’odre se fait à travers les milices du Fatah et du Hamas qu’on croise de temps à autre, le ramassage des ordures n’est pas assuré.
Bref, les gens vivent dans du provisoire qui dure depuis près de 60 ans dans l’attente d’un hypothétique retour en Palestine et ceci dans l’indifférence totale des classes dirigentes. Tout est fait pour rappeler au réfugé qu’il est justement un réfugié et rien d’autre. C’est la Nakba, la grande catastrophe, qui a précipité des milliers de familles à  venir trouver refuge au Liban. Ils ont tout quitté, persuadé d’un retour imminent au point  de conserver la clé de leur maison.  Alors depuis 49, date de la création du camp de Sabra et Chatila, on cultive ce souvenir pour savoir d’où l’on vient. Les photos gigantesques de la mosquée Al-Aqsa, affichées aux intersections sont là pour ne pas l’oublier, comme cette fameuse "clé du retour" qu’on transmet aux générations qui n'ont jamais foulé la terre promise.

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